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Écrit par : Anonyme
Titre :Récits d'un pèlerin russe
Date de parution : 1966
Éditeur : La Baconnière

 

Récits d’un pèlerin russe[1]

            Les Récits d’un pèlerin russe ou Récits d’un pèlerin à son père spirituel sont anonymes ; ils furent publiés pour la première fois en Russie en 1870.

            Tout au long de ses récits, l’auteur s’interroge sur la citation de saint Paul « Priez sans cesse »[2] ; il tente de la comprendre et se demande comment la concilier avec la vie et les affaires mondaines, comment la mettre en pratique. Après avoir interrogé plusieurs personnes en vain, il rencontre un « starets », un moine ascète, qui deviendra son maître spirituel.

            Celui-ci lui montre que la citation de saint Paul se rapporte à la prière intérieure perpétuelle, qu’il lui enseigne peu à peu :

« Beaucoup commettent une grande erreur, lorsqu’ils pensent que les moyens préparatoires et les bonnes actions engendrent la prière, alors qu’en réalité c’est la prière qui est la source des œuvres et des vertus. »[3]

« Seule la fréquence a été laissée en notre pouvoir comme moyen pour atteindre la pureté de prière qui est la mère de tout bien spirituel »[4]

            Il lui enseigne plus précisément la « prière de Jésus » :

« La prière de Jésus intérieure et constante est l’invocation continuelle et ininterrompue du nom de Jésus par les lèvres, le cœur et l’intelligence, dans le sentiment de sa présence, en tout lieu, en tout temps, même pendant le sommeil. Elle s’exprime par ces mots : Seigneur Jésus-Christ, ayez pitié de moi ! Celui qui s’habitue à cette invocation ressent une grande consolation et le besoin de dire toujours cette prière ; au bout de quelque temps, il ne peut plus demeurer sans elle et c’est d’elle-même qu’elle coule en lui. »[5]

            Pour mieux comprendre ce qu’est la prière perpétuelle intérieure, le starets recommande au pèlerin la lecture de la Philocalie, florilège de textes des Pères de l’Église. Ensuite, il lui conseille de réciter chaque jour la prière de Jésus, trois mille fois au début, puis six mille, douze mille, et enfin, sans plus compter, jusqu’à ce que la prière fasse véritablement partie de lui, qu’il la récite sans arrêt, de jour comme de nuit. Au bout d’un certain temps, ce ne sont plus ses lèvres, mais son cœur qui récite la prière. Très vite, cette prière comble sa solitude et en fait le plus heureux des hommes.

            Malheureusement, le starets meurt quelques mois plus tard. Son disciple reprend alors sa vie de pèlerin errant et solitaire, avec toutefois la prière perpétuelle, la Philocalie et la Bible comme compagnes. Son starets ne l’abandonnera cependant pas : à plusieurs reprises, il lui apparaît en rêve pour lui donner des recommandations, lui conseiller des lectures, ou même lui expliquer certains passages de la Philocalie. Tout au long de son voyage, le pèlerin rencontre différentes personnes ; qu’il s’agisse de brigands qui le détroussent, du capitaine de l’armée ou de la famille pieuse qui l’héberge, il tire toujours un enseignement de leur rencontre. À la fin du récit, il entreprend un voyage vers Jérusalem.

            Comme il l’explique plus loin, notre pèlerin s’est retrouvé orphelin dès son plus jeune âge, et a perdu l’usage d’un bras, ce qui lui ôtait l’accès aux métiers manuels ; c’est pourquoi son grand-père lui avait appris à lire et à écrire – ce qui était plutôt rare dans la société paysanne russe de l’époque. Suite à un incendie de l’auberge qu’il avait reçue en héritage et après le décès prématuré de sa femme, il avait été contraint d’errer et de mendier son pain, ou de faire des petits travaux – tout en sachant qu’il était incapable de se servir de son bras gauche. Ilse contente de très peu, et est prêt à sacrifier tout le confort possible et le peu qu’il possède pour pouvoir lire la Philocalie et la Bible et prier en paix.

            Voici encore quelques réflexions intéressantes tirées de ces Récits :

« La prière spontanée du cœur a été ma consolation tout le long de la route, elle n’a jamais cessé de me réjouir, bien qu’à des degrés divers ; nulle part et à aucun moment elle ne m’a gêné, rien n’a jamais pu l’amoindrir. Si je travaille, la prière agit d’elle-même dans mon cœur et mon travail va plus vite ; si j’écoute ou lis quelque chose avec attention, la prière ne cesse pas, et je sens au même moment l’un et l’autre comme si j’étais dédoublé ou que dans mon corps se trouvaient deux âmes. Mon Dieu ! Combien l’homme est mystérieux !… »[6]

À un moment, le pèlerin perd l’usage de ses jambes, paralysées par le froid et la glace. Alors qu’il est sur le point de mourir, un paysan prétend pouvoir le guérir. Voici sa recette :

« [...] Il ramassa dans les champs, dans les cours et dans les trous à ordures une pleine mesure de vieux os de bêtes, d’oiseaux et de toutes sortes ; il les lava, les brisa en petits morceaux avec une pierre et les mit dans une grande marmite ; il la coiffa d’un couvercle avec un trou et retourna le tout au-dessus d’un vase qu’il avait enfoncé en terre. Il enduisit soigneusement le fond de la marmite d’une couche épaisse de terre glaise et la couvrit de bûches qu’il laissa brûler pendant plus de vingt-quatre heures. En installant les bûches, il disait : – Tout ça va faire un goudron d’os. Le lendemain, il déterra le pot, dans lequel avait coulé par l’orifice du couvercle environ un litre d’un liquide épais, rougeâtre, huileux et sentant comme la viande fraîche ; les os restés dans la marmite, de noirs et pourris qu’ils étaient, avaient maintenant une couleur aussi blanche et transparente que la nacre ou les perles. Cinq fois par jour je me frictionnai les jambes avec ce liquide. »[7]

            Voyant l’efficacité immédiate de cette médecine, le pèlerin s’exclame :

« [...] La sagesse de Dieu apparaît dans ses créatures ! Des os desséchés, ou pourris, déjà presque revenus à la terre, gardent en eux la force vitale, une couleur et une odeur ; ils exercent une action sur les corps vivants, auxquels ils peuvent rendre la vie ! C’est un gage de la Résurrection future. Si j’avais pu faire connaître cela au garde forestier chez qui j’ai vécu, et qui doutait de la Résurrection des corps ! »[8]

On trouve aussi un commentaire du début du Notre Père, selon la mystique des Pères de l’Église :

« Notre Père qui êtes aux cieux ; dans le livre que vous avez lu, on déclare que ces paroles signifient qu’il faut aimer fraternellement notre prochain, car nous sommes tous fils d’un même Père. C’est très juste, mais les Pères y ajoutent un commentaire plus spirituel – ils disent qu’en prononçant ces mots, il faut élever son esprit vers le Père céleste, et se rappeler l’obligation d’être à chaque instant en présence de Dieu. Les paroles : Que votre nom soit sanctifié s’expliquent dans ce livre par le soin qu’il faut mettre à ne pas invoquer en vain le nom du Seigneur ; mais les commentateurs mystiques y voient la demande de la prière intérieure du cœur, c’est-à-dire, pour que le nom de Dieu soit sanctifié, il faut qu’il soit gravé à l’intérieur du cœur et que par la prière perpétuelle il sanctifie et illumine tous les sentiments, toutes les forces de l’âme. Les paroles Que votre Règne arrive sont expliquées ainsi par les Pères : Que viennent dans nos cœurs la paix intérieure, le repos et la joie spirituelle. Dans le livre, on explique que les paroles : Donnez-nous aujourd’hui notre pain quotidien, concernent les besoins de notre vie corporelle, et ce qui est nécessaire pour venir en aide au prochain. Mais Maxime le Confesseur entend par pain quotidien le pain céleste qui nourrit l’âme, c’est-à-dire la Parole de Dieu, et l’union de l’âme avec Dieu par la contemplation et la prière perpétuelle à l’intérieur du cœur. »[9]

« […] La prière intérieure, qui plus que tout illumine mon ignorance, ce n’est pas moi qui l’ai acquise ; elle est née dans mon cœur par la miséricorde divine et grâce à l’enseignement du starets. Chacun peut en faire autant ; il suffit de se plonger plus silencieusement dans son cœur et d’invoquer un peu plus le nom de Jésus-Christ, aussitôt l’on découvre la lumière intérieure, tout devient clair, et dans cette clarté apparaissent certains mystères du Royaume de Dieu. Et c’est déjà un grand mystère lorsque l’homme découvre cette capacité de rentrer en soi, de se connaître vraiment et de pleurer doucement sur sa chute et sur sa volonté pervertie. […] Ce qu’il y a, c’est que nous sommes loin de nous-mêmes et que nous ne souhaitons guère nous en rapprocher, nous fuyons toujours pour ne pas nous trouver en face de nous-mêmes, nous préférons des bagatelles à la vérité et nous pensons : j’aimerais bien avoir une vie spirituelle, m’occuper à la prière, mais je n’en ai pas le temps, les affaires et les soucis m’empêchent de m’y livrer vraiment. Mais qu’est-ce qui est plus important et plus nécessaire, la vie éternelle de l’âme sanctifiée, ou la vie passagère du corps pour lequel nous nous donnons tant de mal ? C’est ainsi que les gens parviennent soit à la bêtise, soit à la sagesse. »[10]

            Ce petit livre se lit très facilement ; les récits sont prenants. Et surtout, le pèlerin donne envie à son lecteur de s’exercer à la prière perpétuelle, qui fait de lui le plus heureux des hommes, alors qu’il est aussi le plus pauvre d’entre eux.



[1] Nous donnons les références selon l’édition de 1966. Récits d’un pèlerin à son père spirituel, Traduits et présentés par Jean Laloy, nouvelle édition revue et mise à jour, Boudry, La Baconnière, 1966. Il existe de nombreuses éditions plus récentes. On trouve aussi le livre en PDF à l’adresse suivante : www.db-prods.net/blog/wp.../Recits-dun-pelerin-russe-Inconnue.pdf
[2] Paul, I Thess, 5, 17.
[3]Récits d’un pèlerin à son père spirituel, op. cit.,p. 27.
[4]Ibid. p. 28.
[5]Ibid. p. 29.
[6]Ibid.,p. 71.
[7]Ibid.,p. 92.
[8]Ibid.,p. 93.
[9]Ibid. ,pp. 125-126.
[10]Ibid., pp. 130-131.

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